people in motion

people in motion

vendredi 30 août 2013

Hyman Minsky avait raison


Le capitalisme rongé par l'instabilité financière 


Nous n’avons encore rien vu puisque en fait rien n’a encore été résolu, noyé sous un tsunami de liquidités et que ces pays à larges surplus, la Chine et émergents, font aujourd'hui face à des turbulences qui ne sont que les prémisses d'une nouvelle phase de la crise de 2007. 



"Hyman Minsky avait raison" : voilà l'exclamation que lancent les observateurs de la crise financière des crédits hypothécaires pour peu qu'ils apprécient la recherche académique. Mais qui est donc Hyman Minsky ?



L'homme est décédé en 1996, à l'âge de 77 ans. En faisant une synthèse originale de Keynes et Schumpeter, Hyman Minsky a analysé le rôle de la monnaie, de la banque et des finances comme sources principales de l'instabilité du capitalisme.  L'un des thèmes de ses travaux qui sonne particulièrement juste aujourd'hui concerne ce qu'il a appelé une "hypothèse d'instabilité financière" dans un papier publié en 1992.  

Cette approche, que l’on qualifie d’hypothèse d’instabilité financière et parfois de Wall Street paradigm, suggère que le processus de fragilisation financière constitue une tendance véritablement endogène à toute phase prolongée de stabilité macroéconomique et de prospérité. Autrement dit, l’instabilité financière est une caractéristique propre aux économies capitalistes modernes.

Ses analyses ont par ailleurs trouvé un écho plus large, jusque dans les milieux de la finance. On appelle parfois « moment Minsky » le point où les investisseurs sur-endettés sont contraints de vendre en masse leurs actifs pour faire face à leur besoin de liquidité, déclenchant une spirale de baisse auto-entretenue du prix de ces actifs et un assèchement de la liquidité.


Répétition des bulles 

Il mentionne entre autres qu’en période prolongée d’expansion caractérisée par une constance des flux monétaires, les agents économiques oublient les leçons du passé et augmentent leur niveau de risque. Ainsi, la stabilité financière nourrit l’instabilité selon Minsky. Cette dernière décennie illustre ce phénomène de diminution d’aversion au risque par de l’accommodement déraisonnable au crédit et a ouvert tout grand la porte aux dérives des subprimes (développés , distillés, répandus à grands renforts de pub et de manipulations par les financiers il faut bien le souligner). Minsky l’a d’ailleurs parfaitement identifié et décrit.

Le phénomène de répétition des bulles découle lui de la « théorie de la fragilité systémique » énoncée par Hyman Minsky dès 1977, soit antérieurement aux grands mouvements de globalisation financière et de régulation financière qu'il l'ont accompagnée. 

Que dit Hyman Minsky qui part d'analyses séculaires, notamment du début du XXème siècle ? En substance, il décrit le cycle financier en trois phases : la première est prudente, c'est l'ère de la « hedge finance » où l'endettement et ses intérêts sont couverts par le taux de croissance courant ; puis, entraînée par les succès engrangés et par le souci des banques de surperformer leurs concurrentes, vient l'ère de la finance spéculative où l'exécution des plans de financement suppose une accélération de la croissance, où seul le paiement des intérêts est assuré par la croissance courante ; enfin, vient l'ère de la finance dite « Ponzi » où il est acquis dès l'origine de l'octroi des crédits que les défaillances ne pourront être évitées que moyennant un rééchelonnement des dettes. 
Avec le subprime, le système financier était clairement dans une situation « Ponzi ». 


Ponzi Scheme


Pourquoi « Ponzi » ? En hommage à Charles Ponzi, célèbre fondateur d'une pyramide financière qui ravagea Boston en 1919-20. Est-on toujours à Boston en 1920 ? La régulation financière n'y a rien changé. Les crises se répètent à rythme accéléré : Amérique latine en 1982, marchés boursiers et obligataires en octobre 1987, Savings and Loan américaines en 1988, marché des changes européens en 1992-93, marché immobilier en 1993, marché obligataire en 1994, marché monétaire asiatique en 1997, dette russe et LTCM en 1998, bulle Internet et boursière en 2001-2003, subprime en 2007. La « finance spéculative » est devenu la norme, la finance « Ponzi » n'est jamais loin.

L'idée est que les professions financières (banquiers mais aussi toute sorte d'intermédiaires) cherche à maximiser leurs profits en proposant des produits de financement innovants. Cette recherche de profits conduit à une accélération de la distribution de crédit et, autre effet quasi-simultané, à un accroissement des prix de certains actifs (l'immobilier dans la crise actuelle).

Hyman Minsky identifie trois groupes de personnes morales ou physiques qui vont profiter de ces innovations financières : "Hedge unit, speculative unit et Ponzi unit" que l'on peut traduire en bon français par "acheteur rassurant", "spéculateur" et "fraudeur en pyramide"= »jeu de l’avion ».

L'acheteur rassurant est celui qui va emprunter une portion seulement du bien qu'il souhaite acquérir. Ses fonds propres sont confortables et le rendement qu'il tirera de son bien, éventuellement par une location, sera suffisant pour rembourser le capital et régler les intérêts. 

Les spéculateurs sont un peu plus ambitieux. Ils empruntent plus, disposent de moins de fonds propres et ne peuvent assurer que le paiement des intérêts, sans remboursement du principal. Ce dernier est refinancé, à échéance du premier emprunt, par la contraction d'un autre prêt. 

Le fraudeur en pyramide n'est pas capable de payer les intérêts et encore moins de rembourser le principal. Ils ont recours à la capitalisation des intérêts et ne peuvent espérer gagner de l'argent qu'en trouvant quelqu'un qui voudra bien leur racheter leur bien plus cher qu'ils ne l'ont payé.

Cette théorie a trouvé un merveilleux champ d'application aux Etats-Unis grâce à l'innovation propre aux banquiers new-yorkais mais aussi grâce au phénomène de mondialisation financière. D'aucuns ont utilisé les  théories d'Hyman Minsky pour décrire le mécanisme d'une crise financière en six étapes :

Pour la première étape, il faut une innovation de rupture.

Cela peut concerner la technologie (Internet), un changement de politique macro-économique (ouverture des frontières, augmentation du commerce mondial), une modification de la politique de taux d'intérêt ou une fameuse innovation financière comme la titrisation des créances hypothécaires et leur repackaging en Collaterized Debt Obligation (CDO).

Pendant la seconde étape, les prix des actifs concernés commencent à monter (sociétés technologiques, valeurs des pays émergents, immobilier résidentiel américain). La dynamique de hausse devient rapidement visible par un plus grand nombre d'investisseurs.

Lors de la troisième étape, le crédit peu cher et largement distribué fait son apparition. Il peut prendre plusieurs formes comme celle des prétendus venture capitalists qui ont financé le gonflement bulle Internet, ou celle des banques quasi-nationales des pays émergents d'Asie qui ont financé leurs champions nationaux.

Cette phase d'accélération par le crédit aboutit à l'étape euphorique : les prix des actifs ne cessent d'augmenter et servent de garantie soi-disant solide pour emprunter de nouveaux fonds. Les spéculateurs et les fraudeurs à la pyramide en sont la cause mais aussi les financiers.

Aux Etats-Unis et avant 2007, les banques américaines et les organismes de financement ont distribué des crédits à des gens auxquels elles n'auraient jamais prêté un cent 10 ans plus tôt. Il est vrai que ces derniers ont perdu toute réserve, bombardés qu'ils étaient de publicités ou de "succes stories" (J'ai fait fortune dans l'immobilier sans un sou en poche).

Cette euphorie n'empêche pas certains de garder la tête froide et de se retirer à temps de la table du casino. C'est la cinquième étape, celle de la vente des initiés qui permet aux prix des actifs de se stabiliser. Peu à peu, ils déclinent, les mauvaises nouvelles s'empilent, les spéculateurs et les fraudeurs à la pyramide sortent du jeu est c'est la sixième étape, celle de la répulsion.

Pour être juste, et si on considère uniquement l'innovation financière des CDO, les grands investisseurs institutionnels américains se sont retirés de ce marché fin 2003. Le super-carburant du cycle de Minsky faisant défaut, l'immobilier américain aurait du connaître un ralentissement plus ou moins prononcé dès 2004.

S'il a été repoussé en 2007, c'est que les banques américaines ont su trouver d'autres types d'investisseurs institutionnels pour acheter leurs fameux CDO, notamment les banques des pays qui disposent de larges surplus commerciaux.

Aujourd'hui je serais tenté de dire que nous n’avons encore rien vu puisque en fait rien n’a encore été résolu, noyé sous un tsunami de liquidités et que ces pays à larges surplus, la Chine et émergents, font aujourd'hui face à des turbulences qui ne sont que les prémisses d'une nouvelle phase de la crise de 2007. 

Pour en savoir plus :


BROSSARD, Olivier (2001), D’un krach à l’autre. Instabilité et régulation des économies monétaires, Grasset et Fasquelle. 

CHARLES, Sébastien (2006), Macroéconomie hétérodoxe. De Kaldor à Minsky, L’Harmattan.
MINSKY, Hyman P. (1982), « The financial hypothesis : Capitalist processes and the behaviour of the economy », in C. Kindleberger & J.-P. Laffargue (dir.), Financial Crises. Theory, History, and Policy, Cambridge University Press. 


Les éditions Diaphanes viennent de publier la traduction d’un article d’Hyman Minsky, « The financial hypothesis : Capitalist processes and the behaviour of the economy », tiré d’un ouvrage co-dirigé par Charles Kindleberger et publié à l'origine en 1982. Cette traduction est réjouissante à plus d’un titre. Non seulement les ouvrages français sur Minsky sont bien rares (il faut tout de même noter les très bons D’un krach à l’autre d’Olivier Brossard et Macroéconomie hétérodoxe de Sébastien Charles), mais il n’y avait jusqu’à présent aucun ouvrage de Minsky disponible en langue française. En outre, il s’agit peut-être de la synthèse la plus aboutie que ce dernier ait proposée de sa propre pensée.
Dans la préface à l’ouvrage, Jospeh Vogl rappelle ainsi combien l’hypothèse d’instabilité financière s’avère un cadre théorique des plus pertinents pour analyser et interpréter les évolutions qui ont touché la sphère financière et l’économie mondiale depuis 1982, en particulier la crise du crédit subprime et la Grande Récession. Le boom de l’immobilier des années deux mille fut en effet l’occasion d’une fragilisation financière de l’économie américaine. Les innovations financières ont joué un rôle fondamental en mettant à disposition des agents une offre massive de financement, mais cela au détriment de la qualité du crédit et dans de la stabilité globale. 

Même si Minsky mourut trop tôt pour voir la diffusion de cette technique, il a toutefois écrit un memo en 1987 dans lequel il précisait la nature et les implications du processus de titrisation. La hausse des prix immobiliers a soutenu amplement le boom en validant la structure d’endettement optée par les ménages et les institutions financières. De nombreux agents ont alimenté la dynamique de fragilisation en reconduisant leur endettement pour rembourser leurs dettes passées. Cet endettement a été un vecteur d’expansion pour l’économie américaine. Il n’était toutefois soutenable que si les prix immobiliers poursuivaient leur hausse. L’apparente stabilité macroéconomique et la régularité de la croissance dissimulaient les déséquilibres aux autorités monétaires. 

Au milieu de l’année 2006, le marché immobilier américain s’est retourné : les ventes de maisons ont chuté et l’augmentation des prix qui avait été jusque-là très rapide s’est arrêtée. L’accumulation de déséquilibres macrofinanciers s’est traduite par une crise financière au cours de l’été 2007. Les innovations financières qui concoururent à soutenir l’activité depuis le début de la décennie se sont alors révélées être de puissants canaux de transmission de l’instabilité financière. Les autorités budgétaires et monétaires sont intervenues pour contenir les pressions déflationnistes et stabiliser l’activité. L'ampleur de cette intervention a peut-être été insuffisante. Non seulement les économies avancées peinent encore aujourd’hui difficilement à renouer avec la croissance, mais l’environnement institutionnel n’a pas été suffisamment retouché pour empêcher l'éclatement d'une nouvelle crise financière.

Comme l’indique clairement Minsky dès les premières pages, l’hypothèse d’instabilité financière repose sur une conception des fluctuations macroéconomiques qui contraste radicalement avec la vision d’une économie harmonieuse, autorégulée et constamment à l’équilibre. La théorie standard ne suppose pas l’existence de forces déséquilibrantes endogènes aux économies capitalistes. En développant des modèles où la finance, l’incertitude et l’histoire sont absentes, elle s’avère incapable de penser l’instabilité financière. Par contre, en introduisant explicitement la monnaie, Keynes a su donner une explication cohérente de la Grande Dépression. Le chômage est apparu et s’est aggravé car les autorités publiques ont laissé une crise financière dégénérer. Or, lorsque le chômage est dû une insuffisance de la demande globale, la flexibilité des prix et des salaires aggrave la situation en empêchant les emprunteurs d’obtenir les liquidités nécessaires pour rembourser leurs dettes.

L’investissement a une place fondamentale dans la théorie de la production et de l’emploi de Keynes. Il n’importe pas pour sa seule influence sur l’accumulation du capital, donc sur la croissance à long terme. Il est en outre un déterminant essentiel de la demande au niveau agrégé et il participe ainsi à l’émergence de cycles d’affaires à court terme. Keynes visait à expliciter les conditions dans lesquelles les dynamiques macroéconomiques sont influencées par la monnaie, définie au sens large. Il met ainsi en avant l’influence centrale qu’exercent les variables financières et l’incertitude sur l’investissement. Toutefois, le fait que la théorie keynésienne du cycle néglige la question du financement même de l’investissement la rend incomplète selon Hyman Minsky. En effet, la Théorie générale suppose implicitement que l’investissement obtiendra un financement. C’est dans cette optique que Minsky a cherché à compléter la théorie keynésienne de l’investissement avec une théorie financière de l’investissement. Et pour cela, il s’est fortement inspiré des travaux de Kalecki.

Le futur est créé par les décisions actuelles et futures, par nature imprévisibles, des agents économiques. Dans cet environnement d’incertitude radicale, la décision d’investir apparaît alors comme un véritable pari sur l’avenir. Les actifs capitaux (une centrale électrique... pour reprendre l’exemple de Minsky) sont des biens durables dont l’utilisation au sein du processus productif ou tout simplement la détention procure à l’entreprise des flux de recettes monétaires, appelés cash flows, flux de trésorerie ou encore « quasi-rentes ». Le prix qu’un entrepreneur est prêt à payer pour acquérir un tel actif dépend alors pour beaucoup de ses anticipations de recettes. Le projet n’est viable que lorsque les quasi-rentes actualisées excèdent suffisamment le coût de l’investissement pour compenser les incertitudes. Si le projet est viable, l’entrepreneur ne peut le mettre en œuvre que s’il dispose d’un financement suffisant. Puisque l’entreprise peut difficilement autofinancer ses projets d’investissement, elle doit nécessairement faire appel au système financier. Les prêteurs n'acceptent de fournir un financement qu'en ajoutant une marge de sécurité aux intérêts pour compenser le risque d’un non-remboursement.

Par conséquent, les agents doivent prendre en compte deux séries chronologiques : d’une part, il y a la série des recettes futures qui doivent effectivement être réalisées et, d’autre part, la série des paiements monétaires qui sont déterminés par la structure d’endettement optée par le passé et dont l’évolution est liée à celle des coûts de financement dans la période courante. Alors que les profits effectifs constituent une ressource en liquidité essentielle aux entreprises pour honorer leurs engagements de paiements, les profits anticipés, qui ne sont pas indépendants des profits réalisés, sont précisément la raison pour laquelle elles entreprennent des projets d’investissement. Il est indispensable que les flux de profits anticipés et réalisés soient suffisamment élevés pour que les entreprises puissent contracter de nouveaux prêts ou reporter leurs dettes. Ainsi, les anticipations de profits futurs déterminent les décisions d’investissement et de financement de la période courante ; les flux actuels de profits valident les décisions prises par le passé. Pour Minsky, la relation qui s’établit alors entre les flux de revenu bruts et les paiements de dette est bien celle, cruciale, qui sous-tend les dynamiques macroéconomiques
La robustesse financière d’une entreprise est fonction positive des cash flows que suscite chacun de ses projets d’investissement et fonction négative des flux de charges financières que ces mêmes projets engendrent. Cela amène Minsky à distinguer les entreprises, et plus généralement les agents économiques, selon leur mode de financement. Il identifie ainsi trois structures financières, en l’occurrence les finances prudente, spéculative et Ponzi. Les agents dont la finance est qualifiée de prudente sont ceux dont les cash flows sont suffisants pour faire face, à toute période, aux charges financières. La finance est dite spéculative lorsque les cash flows couvrent les charges d’intérêt à chaque période, mais se révèlent toutefois insuffisants pour rembourser en totalité le principal. Les agents spéculateurs sont ainsi contraints de reconduire continûment leur endettement en émettant par exemple une nouvelle dette pour rembourser le principal des dettes arrivées à échéance. Les banques, notamment parce qu’elles transforment les dépôts à court terme en prêts à long terme, sont typiquement spéculatives. En ce qui concerne les agents pratiquant la finance Ponzi, les cash flows ne couvrent ni le principal, ni même entièrement les charges d’intérêt. L’unité Ponzi est naturellement amenée à emprunter de nouveau ou bien à vendre des actifs pour payer les intérêts. Certains projets d’investissement dont la durée de gestation est particulièrement longue nécessitent, du moins pour un temps, ce type de financement. 
Minsky précise alors le processus de fragilisation financière de l’économie. La mesure de la robustesse globale d’une économie se mesure selon la répartition des différentes unités qui la composent entre les trois structures financières. L’économie est d’autant plus fragile que le poids des unités engagées dans les finances spéculative et Ponzi est important. Dans une situation où prédominent les structures de financement spéculative et Ponzi, un accroissement des taux d’intérêt est propre à amener les agents à réévaluer à la baisse la valeur actualisée et donc entraîner une crise financière. Or, selon Minsky, une économie où dominent les agents prudents va naturellement tendre à devenir une économie où dominent les unités spéculatives et Ponzi. Un système où le financement est essentiellement prudent peut se caractériser par des taux d’intérêt de court terme particulièrement bas au regard des taux de long terme. Avec un tel agencement des taux d’intérêt, il est possible de réaliser des profits en adoptant des comportements spéculatifs. Il s'ensuit une demande accrue d’actifs, une élévation des prix d’actifs et une multiplication des possibilités de gains en capital. Si les agents économiques réalisent et s’attendent à réaliser des gains considérables, alors ils seront naturellement portés à se tourner vers des modes de financement spéculatifs et Ponzi.
Après une certaine période de stabilité macroéconomique, le niveau acceptable d’endettement s’élève. Les banquiers réduisent leur prime de risque, ils acceptent de prêter davantage aux entreprises et ils augmentent pour cela leur propre niveau d’endettement. Avec la diffusion des nouveaux instruments et des nouvelles pratiques financières, le montant de financement disponible pour financer l’activité économique s'accroît. Minsky souligne ainsi le rôle de l’innovation financière dans la dynamique de l’économie. Les prix d’actifs, le niveau d’investissement et le rendement du stock existant d’actifs tendent à augmenter. Les profits croissants générés par un boom d’investissement font bénéficier aux entreprises qui les accumulent de la capacité, du moins apparente, à supporter davantage de dette. L’augmentation concomitante de l’investissement et de l’endettement entraîne une plus grande fragilité financière du système. Ainsi, la simple réalisation des anticipations rend possible l’émergence d’une dynamique instable au sein de l’économie, et ce de façon endogène. C’est bien en ce sens que Minsky considère que « la stabilité est déstabilisante » (p. 51).
Le boom d’investissement subsiste tant que les anticipations optimistes relatives aux rendements sont vérifiées. Mais certains événements peuvent amener de nombreux agents économiques à vouloir lever du cash au même instant. Le boom d’investissement risque en l’occurrence de pousser la banque centrale à relever ses taux directeurs pour réduire les pressions inflationnistes. Avec le resserrement des conditions de financement, les emprunteurs procèdent alors simultanément à des ventes d’actifs. Après avoir liquidé l’actif circulant, certaines entreprises sont même poussées à se défaire d’une partie de l’actif immobilisé, or de telles ventes d’actifs réduisent mécaniquement les futurs cash flows. La détérioration de la situation financière des emprunteurs pousse les prêteurs à exiger de plus fortes primes de risque et à resserrer ainsi les conditions de financement. L’investissement se contracte et entraîne un ralentissement de l’activité via les effets du multiplicateur keynésien. L’ensemble de ce processus peut s’aggraver et pousser l’économie dans un régime déflationniste : la chute des prix d’actifs pousse leurs détenteurs à les vendre, ce qui accélère le déclin de leur prix. Sur ce point, Minsky est en l’occurrence l’un des premiers économistes à avoir saisi la portée du concept de 
déflation par la dette développé par Irving Fisher (1933). Il introduit ce concept dans sa propre analyse en donnant un rôle crucial aux prix d’actifs. 


L'hypothèse d'instabilité financière serait incomplète sans la prise en compte du cadre institutionnel. Celui-ci est en effet déterminant pour la fragilisation de l'économie et la résolution des crises. En période de turbulences économiques, une relance budgétaire risque de se révéler insuffisante. Les déficits publics compensent en partie la diminution des profits résultant de la chute de l’investissement, mais ils ne peuvent directement enrayer la chute du prix des actifs. L’intervention de la banque centrale en tant que prêteur en dernier ressort se révèle alors essentielle pour stabiliser l’activité. L’intervention des autorités monétaires est avant tout destinée à désamorcer le processus de déflation par la dette. La banque centrale doit tout d’abord agir en augmentant le volume de monnaie en circulation lorsque le marché monétaire s’est asséché ; une telle situation s’observe notamment lorsque la valeur des actifs que les agents peuvent échanger contre de la liquidité s’est effondrée. Le prêteur en dernier ressort vise à éviter qu’une défaillance locale ne se transmette à l’ensemble du système et se traduise par une chute massive des prix d’actifs. Les autorités monétaires doivent ensuite jouer sur les taux d’intérêt durant la période de restructuration financière qui suit une crise de façon de manière à faciliter le retour à une finance prudente. La banque centrale porte enfin la responsabilité d’aiguillonner le développement du système financier : la régulation et la supervision du secteur bancaire visent alors à contenir ses éventuels débordements spéculatifs.

L’environnement institutionnel que les autorités mettent en place suite à une crise financière pour empêcher la répétition des épisodes d’instabilité va toutefois perdre de son efficacité au cours du temps. Les agents privés modifient leurs comportements, innovent, pour contourner les barrières institutionnelles et poursuivre leur course au rendement. Des marchés financiers échappant à toute régulation apparaissent régulièrement. Les autorités doivent alors constamment modifier le cadre institutionnel en réponse aux innovations financières. Les réformes conduites sous Roosevelt avaient érigé des barricades à la finance spéculative. Hyman Minsky note toutefois que, depuis le milieu des années soixante-dix, la Fed oriente trop peu l’évolution de la finance américaine et laisse ainsi émerger des conditions propices à l’instabilité financière. 





Le cerveau et ses automatismes



Le pouvoir de l'inconscient


À 90 %, les actes que nous entreprenons au quotidien se déroulent à notre insu, avec un cerveau en pilotage automatique… La conscience ne serait ainsi qu’une sorte de clap de fin qui se manifeste lorsque tout est déjà joué – un tour de passe-passe de notre cerveau pour nous faire croire que nous avons encore notre mot à dire. L’amour est le domaine dans lequel nous sommes le plus assujettis à des automatismes inconscients, mais selon les individus, ce sont quatre cerveaux différents qui président au choix de l’élu(e). Les ballets que dansent dopamine, sérotonine, testostérone, œstrogènes, endorphine et ocytocine dans notre tête ne peuvent que nous la faire perdre. La grande distribution qui, elle, a les pieds sur terre, a sollicité les neurosciences pour comprendre et faire fructifier nos humeurs “acheteuses”. D’autres experts étudient la part d’intuition qui intervient chez des personnes en état de stress devant une table de casino ou chez des pilotes devant un simulateur de vol.






 ET une finalité

 

Behavioral Finance 

Investors have emotions and mental frameworks to process information that makes their decisions irrational, though perfectly "normal". 

But behavioral finance is at the individual level, not the group or the societal level. The title of the post linke
d above is clear: the biases examined by behavioral finance are psychological. At the group level, the dynamics might different, but to discover that, we need more work from the sociology of finance and crowd psychology.


mercredi 28 août 2013

FATCA : Arme d'asservissement massif


Fatca (Foreign Account Tax Compliance Act) : 

Le véritable objectif n’est pas fiscal, 

Recueillir des informations est une fin en soi


James George Jatras a fondé le site RepealFatca (abrogez Fatca). Cet ancien diplomate américain, de 1979 à 1985, a ensuite fait partie des conseillers de la fraction républicaine du Sénat, spécialisé notamment sur les questions de politique étrangère. Depuis 2002, il est dans le secteur privé, actuellement managing director du Global Strategic Communication Group où il s’occupe des relations avec les gouvernements.


Quand avez-vous fondé RepealFatca? 

C’était à l’automne de 2011. J’avais entendu parler de Fatca de la part de collègues allemands et je me suis dit que quelqu’un devait faire sortir l’information sur cette loi illogique et irresponsable. RepealFatca veut promouvoir une meilleure compréhension de Fatca et canaliser les efforts pour créer une plate-forme de lobbying. 

Partez-vous seul au combat? 

Cette plateforme est mon initiative personnelle. L’objectif est d’une part de faire connaître les problèmes liés à Fatca et, d’autre part, de servir de point de ralliement pour tous ceux qui seront désavantagés par cette loi, c’est-à-dire à peu près tout le monde. En tant que lobbyiste, je vois aussi une opportunité de fournir un service et RepealFatca est aussi ne plateforme pour une campagne médiatique. J’agis par conviction et je n’ai pas de mandat. Pour cela, il faudrait que quelqu’un décide de combattre Fatca, et le seul endroit où il est possible de s’en débarrasser c’est les Etats-Unis. Il y a des gens prêts à dépenser des milliards pour mettre en œuvre Fatca, mais personne ne donne rien pour abolir cette loi. 

Quels sont vos relais au Congrès et dans le secteur bancaire? 

Je pars au combat avec le sénateur Rand Paul et le représentant Bill Posey. Il y aussi les Credit Unions of North America et le Center for Freedom and Prosperity, un think tank. Dans le secteur financier, il y a quelques banques de Floride et du Texas. Les banques des autres Etats n’ont pas été actives jusqu’à présent. Mais l’Association des banques américaines s’est tout de même manifestée pour s’opposer à la réciprocité avec le Mexique. 

Cela paraît peu pour faire bouger un pays comme les Etats-Unis…

 A l’étranger, les gens ont l’air de croire que Fatca est pour ainsi dire gravée dans la pierre. Mais aux Etats-Unis, personne ou presque ne connaît cette loi. L’idée est d’informer les gens qui sont touchés, mais ce sera long car nous manquons de ressources, contrairement à ceux qui font la promotion de Fatca, par exemple les avocats qui vendent la soumission à la loi. 

Concrètement,que va-t-il se passer?

 C’est une course contre le temps. Le Trésor va essayer de faire en sorte que les gens à l’étranger ne comprennent pas que la réciprocité qui leur est promise dans tous les accords conclus, sauf avec la Suisse et le Japon, n’est pas valable. Ils espèrent en multipliant les accords intergouvernementaux pousser le Congrès à autoriser la réciprocité, alors qu’elle ne figure pas dans Fatca. Mais il suffit que le processus ralentisse pour que le processus commence à s’enrayer, d’où l’importance de faire connaître cet enjeu à l’étranger. A l’inverse, les Etats-Unis pourraient abandonner Fatca, comme ils ont dans le passé renoncé à faire partie de la Société des Nations après en avoir lancé l’idée, alors que quelques pays seraient paradoxalement susceptibles d’aller de l’avant en établissant des systèmes sur le modèle de la loi américaine. 

Est-ce dans cette perspective qu’il faut expliquer le report de six mois de l’entrée en vigueur de Fatca, au 1er juillet 2014,le deuxième du genre si l’on se souvient que la loi devait initialement entrer en vigueur en janvier 2013?

 Oui. La raison en est à l’exact opposé de ce que dit le département du Trésor. Ils avaient annoncé initialement qu’ils auraient 17 accords avec des Etats étrangers signés à fin 2012. A cette date, ils n’en avaient que 4 et maintenant le nombre de ces accords est de 9. Seule l’Allemagne a ratifié l’accord et elle l’a fait alors même que Angela Merkel dénonçait l’espionnage américain. Etrange réaction.

 En Europe, l’idée prévaut que FATCA est une échéance inéluctable et qu’elle est soutenue par une majorité du Congrès…

 Mais il n’y a pas de majorité au Parlement et le département du Trésor n’a pas les moyens de forcer les banques à accepter la réciprocité. 80% des membres du Congrès et des sénateurs n’ont jamais entendu parler de Fatca, et encore moins de réciprocité. Les gens ne réalisent pas que cette réciprocité signifie: les fonds de pension et les assurances ne savent pas qu’ils seront aussi concernés. Même les sociétés non financières sont touchées par l’obligation d’annoncer les participations de plus de 10%. Au Delaware, il faudrait déjà connaître les propriétaires des sociétés qui y sont enregistrées. 

La réciprocité n’est-elle pas inscrite dans les traités conclus par le Trésor avec les autres pays?

 On utilise le mot de traités à tort. Le Trésor dit que ce sont des traités, mais ce n’est pas clair. Ces textes n’ont pas été envoyés au Congrès et ne lient pas les Etats-Unis. Une réciprocité pleine et entière devrait être approuvée par les deux chambres, et elle ne le sera pas. Quant à la version minimale de la réciprocité, celle qui se limite aux intérêts bancaires, Bill Posey a introduit un projet HR 2299 qui veut l’abroger. Pour ce qui est de la réciprocité élargie prévue par les accords signés par des pays étrangers avec le Trésor, Bill Posey l’a écrit dans sa lettre au Trésor du 1er juillet, il va tout faire pour la bloquer. 

Quelles sont les chances politiques du combat contre FATCA?

 Il y a une chance que les Républicains retrouvent la majorité au Congrès en novembre 2014. Au Sénat, les règles sont plus souples et laissent une marge de manœuvre aux sénateurs pris individuellement. C’est par exemple Rand Paul qui bloque la ratification de la convention passée en 2009 entre la Suisse et les Etats-Unis. Le sénateur estime que ce n’est pas conforme au 4e amendement de transmettre des données sur la seule base de soupçons (suspicious activity report). Bien entendu, cette objection s’applique à Fatca qui veut transmettre les données de tout un chacun sans qu’il soit nécessaire pour cela d’avoir fait quelque chose. 

Mais l’objectif de conformité fiscale n’est-il pas louable?

 Ce qui est recherché c’est l’information, une complète transparence. FATCA devrait rapporter 892 millions par an pendant dix ans, mais les coûts sont eux susceptibles d’atteindre le millier de milliards. C’est comme utiliser une massue pour casser une noix. 

Que peut faire la Suisse dans ce contexte? Le Parlement doit ratifier Fatca en septembre…

 Le Trésor compte sur le plus grand nombre de ratifications possibles et si un centre financier comme la Suisse ne suit pas, cela aura un grand impact. Je suis en contact avec deux douzaines de parlementaires suisses, mais je ne vous en dirai pas plus. Au Royaume-Uni, des voix s’élèvent pour refuser la ratification de l’accord. Si Londres refuse, l’effet sera dévastateur. 

Interview: Mohammad Farrokh/ AGEFI SUISSE 19/7/13 ICI


Choose your social network : click the buttons

jeudi 22 août 2013

The Matrix



Jean Baudrillard was a French philosopher who wrote Simulacra and Simulation. This was the inspiration for the movie The Matrix. In the movie, people live ignorantly in a projected image that they believe is reality. In the same way, we could  argue that there is no real economy anymore -- just false images.



We know the Federal Reserve’s manipulation of asset prices severely hampers our perceptions of market realities. We have a neat metaphor for this linnking the market to an impossible object -- 2-D figures that cannot exist in three dimensions. “Famous examples include the Necker cube, the Penrose triangle, the devil’s tuning fork and the artwork of M.C. Escher,”. My favorite is the Penrose staircase (see illustration).



The fundamental characteristic behind the impossible object is uncertainty of perception. Can you go up the staircase or down? it is important in understanding the distortions of markets.
We live in a world that is nominally capitalistic. There are profits and losses. There are businesses and stock markets. There are interest rates and prices for commodities like oil and gold. We have the glitter and tinsel of capitalism. But do we have the real thing?
Real market prices reflect a process of price discovery. Buyers and sellers freely do their thing, and the results of their actions are the trails of prices those transactions leave behind. The signals these prices emit are what we rely on to plan and invest.
In today’s modern financial system, this process is arrested to a degree that makes the whole thing a fiction or illusion. In a world where global central banks manipulate the cost of risk,the mechanics of price discovery have disengaged from reality.
Consider the Federal Reserve’s recent announcement for so-called QE3. The Fed will buy mortgages in the form of unlimited $40 billion monthly purchases. It will also continue to keep interest rates low through “at least mid-2015.”
These types of “envy policies” that would be frowned upon by These monetary experiments create all kinds of problems. Super-low interest rates create big funding gaps in pension plans, for example, which could lead to social unrest as those pensions can’t make good on their promises. Super-low interest rates also lead to the creation of a lot more debt on an already leveraged financial system, with little bang for the buck. Each dollar added in debt leads to ever smaller increments of economic growth. What the Fed is doing, essentially, is piling up lots of risks in the system to pump up stock prices in the short term. 
It is very hard to justify the risk-to-reward payoff of this monetary experiment. The defense of quantitative easing rests largely on an assessment of what would have happened to the economy absent its support. Nonetheless, we should fear the law of unintended consequences, because it takes a very small shift in perception to result in uncontrollable socioeconomic change. We may get higher asset prices today, but at the expense of inflation, class warfare, social unrest or something even worse tomorrow.
If the Federal Reserve follows through on its promise to buy mortgages to the tune of $40 billion per month, it will own the entire market in a decade. The Federal Reserve is already the largest holder of U.S. Treasury debt. Keep in mind the Federal Reserve is hardly an economic agent in the sense of normal buyers and sellers. It has its own agenda and an unlimited playbook. It is, in short, the illusionist.


The market is no longer an expression of the economy... it is the economy. In other words, central bank strategy is trying to supplant the needs and wants of the market economy with its own ugly designs. It is as if the economy were a horse that pulled a cart, but the Fed wants to use the cart to pull the horse.
Our fiscal well-being is now prisoner to financial and monetary engineering of our own design. Central banking strategy does not hide this fact with the goal of creating the optical illusion of economic prosperity through artificially higher asset prices to stimulate the real economy. In doing so, they are exposing us all to hyper-reality, or what Baudrillard called ‘the desert of the real.’ 
In Fed speak, this is what Bernanke calls the ‘wealth effect,’  he explained the concept: ‘If people feel that their financial situation is better because their 401(k) looks better or for whatever reason... they are more willing to go out and spend, and that’s going to provide demand that firms need in order to be willing to hire and to invest.’”
Bottom line: We must be careful when we weigh “market” prices. We have to think more creatively about what is real and what is smoke and mirrors. Don’t believe the Fed’s goosing of the market is the real thing. Don’t fall for credit-induced prosperity. More so than in the past, market prices can go up and down for reasons having nothing to do with the fundamentals. Yet in the long run, the fundamentals are the only thing that’s real.

Premiers soubresauts, d’une nouvelle phase de la crise


C’est au moment où les risques graves se précisent que la communauté financière, gouvernementale et, bien sûr, médiatique se mettent, avec un bel ensemble, à entonner le chant de la victoire. A la veille de la reprise auto-entretenue aux Etats Unis et, bien sûr, il n’y aurait pas assez de billets de loterie pour tout le monde. 

Dans les turbulences d'un possible retour sur terre dans la politique du Fed on a souligné la hausse des taux long US
Qu’est-ce que cela veut dire ? 
Cela veut dire qu’un réaménagement profond, souterrain, est en train de se produire. On ne le voit pas clairement car des courants et forces de sens contraires s’affrontent et se brouillent, le circonstanciel se mêle au fondamental. 
  • On prépare la transition aux Etats-Unis, la réduction des achats de titres, réduction de QE, peut être que cette réduction portera sur la partie la plus contestée, les MBS. 
  • On doute du succès, de la réussite de la politique japonaise, on devient nerveux 
  • On prend conscience de l’ampleur inattendue des conséquences non voulues des politiques monétaires menées et des contradictions qu’elles portent en elles. De l’importance de flux de capitaux et de leur caractère déstabilisateur. Peut-être même le mythe de la toute-puissance des Banques Centrales est-il en train de se déliter. 
  • On porte une appréciation plus réaliste sur la situation européenne. Et, ce que l’on a mis de côté pendant les semaines d’euphorie spéculative, revient comme un boomerang. D’autant que la situation économique, la vraie, pas celle des Rajoy ou Hollande,  s’aggrave  et que l’Allemagne durcit discrètement ses conditions de réformes  structurelles. Peut-être que les troubles dans plusieurs pays émergents donne à réfléchir aux apprentis sorciers de la déstabilisation sociale. 
  • On prend note de la prochaine révision, vérification indépendante, le mot fort est « indépendante »,  des bilans des banques européennes et de la position de l’Allemagne qui veut que chaque pays apure sa situation lui-même, et le fasse au besoin en amputant les créanciers et dépositaires des banques. 
  • On prête attention aux propos inquiétants que l’on négligé jusque-là. 

En mai dernier c'était Paul Volker qui faisait une condamnation sans appel de la politique de Ben Bernanke et de ses illusions. Puis il y eu, au delà des consensus de façade, Fisher de la Fed de Dallas qui manifestait sa désapprobation avec une vigueur  à peine diplomatique. Puis, c’était le tour d’Esther George de la Fed de Kansas City. 
Ce qui n’est pas perçu, et c’est la même erreur qu’au moment de la crise des subprimes, c’est que tout,  en réalité, malgré l’apparente diversification, tout est corrélé. L’erreur des modèles de risque sur les subprimes a été de ne pas prendre en  compte le fait que le sous-jacent était le même: le logement. Et que ce sous-jacent, par phénomène de foule, pouvait fort bien suivre des voies non linéaires, des voies de contagion. 
Ce qui n’est pas perçu dans la phase actuelle, c’est que tout est également corrélé, par le biais du sous-jacent discret qui unit tous les assets, leur prix, leur volatilité  leur risque  et ce sous -jacent qui crève les yeux mais que l’on ne voit pas, c’est la monnaie. 
Ce qui est au cœur de toute transaction financière, de tout marché, c’est ce que l’on perçoit le moins,  ce que l’on veut ne pas voir,  ce que les maitres du monde escamotent, la monnaie. Nous disons que les forces contraires qui sont à l’œuvre masquent, distordent le phénomène, mais nous sommes en train d’assister à la répétition, aux premiers soubresauts, d’une nouvelle phase de la crise. On touche de nouvelles limites.



Flash Back


Depuis le début de la crise ouverte, manifeste, nous développons la même analyse, nous décrivons le même déroulement .
Le remède monétaire prescrit depuis 2008 n’en est pas un, c’est une drogue qui n’agit que sur les symptômes; en profondeur, le mal gagne, tandis que l’accoutumance progresse. Les économies sont « addictes » à la cocaïne financière, ils en ont besoin pour se maintenir dans l’euphorie. Alors que les rendements décroissent, que les surdoses de l’overshooting japonais déstabilisent les marchés, voilà que les investisseurs, spéculateurs, commencent à se précipiter vers la sortie. 
Comme toujours, l’euphorie et le krach coexistent au même moment, c’est l’euphorie qui fait la « une » des médias et on ignore les coups de tonnerre annonciateurs de noirs présages. Ce n’est pas seulement une question de perception et de propagande, il est de la nature profonde des bulles financières et des excès  d’être particulièrement spectaculaires dans les phases finales et ainsi de masquer les craquements qui se produisent ailleurs, dans une zone lointaine, périphérique. Par ailleurs, les craquements interviennent toujours, absolument toujours, là où on ne les attend pas, là où la fragilité est grande mais non perçue. 
Donc nous avons dit que dans le grand ciel bleu de l’euphorie boursière ambiante, il y avait eu de grands coups de tonnerre annonciateurs de noirs orages. 
Nous ne faisons pas une prévision, nous n’annonçons pas la catastrophe pour demain, nous disons, il y a des coups de tonnerre et il faut savoir les entendre et même les écouter, ils se rapprochent. Nous ne faisons que lire le présent. Les enchainements fatals, s’ils sont reconnus, peuvent être retardés, différés. Cela ne changera rien à l’issue et au déroulement des processus en cours, mais on peut encore les retarder. Une fois de plus nous ne pouvons que souligner: le seul pouvoir des (ir)responsables  autoproclamés de la conduite des affaires est de retarder l’inéluctable. 
Ce  qui trompe, induit en erreur dans les périodes de ce type, c’est l’apparence erratique des mouvements. Ils sont spectaculaires, mais on a du mal à y mettre une logique, on a du mal à tracer les liens de causalité. Certaines manifestations du désordre se semblent se contredire. Les analystes ne voient pas, sous le chaos  des manifestations, la logique profonde de la dislocation qui est en train de s’opérer.